Les femmes en Afrique sont victimes de discrimination en matière de droit de la famille
Le caractère discriminatoire du droit de la famille peut avoir de profondes répercussions car il expose les femmes et les filles à un risque accru de violences sexuelles et basées sur le genre et accroît leur dépendance et leur vulnérabilité
Pour protéger les femmes et les filles dans le cadre du droit de la famille, il est impératif que tous les pays africains adoptent sans tarder un cadre législatif et stratégique
NAIROBI, Kenya, 16 mai 2024/APO Group/ --
Partout en Afrique, la discrimination à l’égard des femmes et des filles reste répandue dans le droit de la famille, selon une nouvelle étude d’Equality Now (www.EqualityNow.org). Une analyse de 20 pays africains révèle que la discrimination sexuelle institutionnalisée dans les systèmes juridiques et les lois coutumières perpétue les inégalités entre les genres en matière de droits relatifs au mariage, au divorce, à la garde des enfants et à la propriété. Malgré d’importantes réformes juridiques, les progrès ont été lents, inégaux et entravés par des revers, un manque de volonté politique et des lacunes dans leur mise en œuvre.
Le rapport intitulé Gender Inequality in Family Laws in Africa: An Overview of Key Trends in Select Countries (https://apo-opa.co/3WGzZts) explique comment la présence de dispositions redondantes et contradictoires dans les cadres juridiques entrave l’interprétation et l’application du droit de la famille et soulève des difficultés complexes pour l’harmonisation des systèmes juridiques.
Le caractère discriminatoire du droit de la famille peut avoir de profondes répercussions car il expose les femmes et les filles à un risque accru de violences sexuelles et basées sur le genre et accroît leur dépendance et leur vulnérabilité, notamment par les limites qu’il impose à leurs opportunités économiques et à leur pouvoir de décision.
L’égalité totale en matière de droit de la famille n’est une réalité dans aucun des pays examinés, à savoir l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Angola, le Botswana, le Burundi, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, l’Éthiopie, la Gambie, le Kenya, le Malawi, le Mozambique, le Nigéria, la République démocratique du Congo (RDC), le Sénégal, le Soudan, le Soudan du Sud, la Tanzanie et la Tunisie.
La nécessité pressante de réformes juridiques profondes
L’Afrique abrite une multitude de groupes ethniques, linguistiques et religieux aux structures de droit de la famille variées. Historiquement, les communautés ont développé des systèmes complexes et profondément enracinés de lois coutumières qui régissent les relations familiales. L’adoption de systèmes juridiques et religieux européens a abouti à un pluralisme juridique composé de lois coutumières, de lois religieuses et de droit écrit qui continue de façonner la législation et la pratique.
Cette juxtaposition complexe subit en outre l’influence de dynamiques sociales en mutation. On constate parfois un empiètement, voire un conflit, entre le droit civil, le droit coutumier et le droit religieux, tel que le droit canonique islamique ou chrétien. De nombreuses dispositions du droit religieux et coutumier sont discriminatoires à l’égard des femmes et des filles.
Esther Waweru, co-auteure du rapport et conseillère juridique principale à Equality Now, explique cette situation : « la culture et la religion constituent souvent des obstacles majeurs dans la lutte en faveur de l’égalité en matière de droit de la famille, qui empêchent les réformes. Des clauses de retour en arrière et des pratiques rétrogrades atténuent les avancées positives de lois progressistes et on assiste à un retour de bâton de la part de mouvements anti-droits qui cherchent à réduire à néant les gains âprement acquis dans des domaines tels que l’élimination du mariage des enfants et des mutilations génitales féminines. »
« S’ajoute à cela le problème de l’immobilisme de la part des gouvernements, qui s’engagent à réformer des lois discriminatoires mais s’abstiennent de prendre des mesures qui vont dans ce sens. Dans certains cas, un sort incertain est réservé aux dispositions progressistes du droit de la famille en attente de promulgation. »
Des progrès en ce qui concerne le mariage des enfants, malgré des lacunes qui subsistent
Le mariage des enfants est l’un des rares domaines où des progrès notables ont été réalisés. L’interdiction absolue du mariage entre personnes de moins de 18 ans existe en Côte d’Ivoire, en Égypte, en Gambie, au Kenya, au Malawi, au Mozambique et en RDC. Cela dit, la persistance du mariage des enfants dans certaines communautés souligne bien la nécessité d’adopter une approche multisectorielle (https://apo-opa.co/3WJ05wa) qui prévoit des activités de sensibilisation aux conséquences néfastes et juridiques du mariage des enfants.
Il est inquiétant de constater qu’au Cameroun, au Nigéria, au Sénégal, au Soudan, au Soudan du Sud et en Tanzanie, le droit autorise toujours le mariage des enfants. Tandis qu’en Afrique du Sud, en Algérie, en Angola, au Botswana, au Burundi, en Éthiopie et en Tunisie, l’âge légal du mariage est de 18 ans, mais des exceptions sont autorisées.
Viol conjugal
Les pays doivent renforcer les mesures de protection contre la violence basée sur le genre, en particulier la violence entre partenaires intimes. Le viol conjugal n’est pas interdit en Algérie, au Kenya, en Gambie et au Soudan, tandis que le Code pénal du nord du Nigéria autorise le viol conjugal et les agressions « correctives » dans le mariage.
Le viol conjugal n’est criminalisé qu’à la séparation du couple en Tanzanie, et au Burundi, la peine est inférieure à 30 jours d’emprisonnement ou une amende. Le droit tunisien stipule qu’une épouse doit remplir ses devoirs conformément aux « us et coutumes », ce qui expose les femmes au risque de viol conjugal, car le rôle traditionnel de l’épouse consiste notamment à satisfaire les besoins sexuels de son mari.
Les tribunaux du Malawi ont déclaré que le viol n’existe pas dans le cadre du mariage. Le droit coutumier suppose le consentement perpétuel à des rapports sexuels dans le mariage, ce que le droit civil du Malawi semble confirmer en ne prévoyant que des circonstances limitées dans lesquelles une femme peut refuser à son mari des rapports sexuels, telles qu’un problème de santé ou en cas de séparation légale.
On peut saluer des pays comme l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et le Mozambique d’avoir explicitement criminalisé le viol conjugal. Il est impératif que tous les pays adoptent l’interdiction du viol conjugal, accompagnée de campagnes de sensibilisation et de services de soutien accessibles aux survivantes. En outre, l’application effective de la loi est cruciale, tout comme la dispense d’une formation complète aux agents des secteurs de la justice pénale, des soins de santé et des services sociaux.
Des pratiques de mariage discriminatoires
Dans la plupart des pays africains, l’enregistrement du mariage dans les registres de l’état civil est une exigence légale régie par des lois spécifiques d’officialisation du mariage. Les femmes mariées dans le cadre d’un mariage coutumier ou religieux sont plus exposées à des risques de discrimination car elles ne disposent pas de la même protection juridique que celles qui sont mariées dans le cadre d’un mariage civil. Il en va de même pour les partenaires de même sexe, dans la mesure où les mariages et les unions civiles sont principalement réservés aux couples hétérosexuels.
La polygamie est légalement autorisée au Cameroun, en Égypte, au Kenya, au Sénégal et au Soudan du Sud, les hommes ayant droit à quatre épouses au Soudan et au Sénégal. La monogamie est inscrite dans le droit écrit de l’Afrique du Sud, de la Côte d’Ivoire et du Mozambique, mais les lois et pratiques coutumières et religieuses continuent de reconnaître la polygamie sans accorder de protection adéquate aux femmes mariées dans le cadre d’un mariage polygame. D’autres pratiques traditionnelles néfastes, telles que l’héritage des veuves et le mariage de substitution, traitent les femmes comme des biens.
Discrimination dans les lois relatives au divorce et à la garde des enfants
Des pays comme le Soudan ont des lois discriminatoires, qui accordent aux maris de plus grands pouvoirs pour introduire une demande de divorce. En Algérie, les femmes ne peuvent demander le divorce qu’en cas d’abandon, de violation du contrat de mariage ou de non-paiement de la pension alimentaire. Au Soudan et en Égypte, dans certains cas de divorce sans faute, la femme doit verser une indemnité financière à son ex-mari.
Les lois sur la garde des enfants ont été réformées en Angola, au Botswana, au Burundi, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Mozambique, en RDC et au Sénégal, et garantissent des droits de tutelle aux deux parents, quel que soit leur statut matrimonial.
La discrimination sexuelle subsiste dans des pays comme le Sénégal, où le père est le tuteur légal, quel que soit le rôle de la mère à s’occuper des enfants. En Tunisie et en Algérie, les pères conservent la tutelle légale même si la mère a la garde des enfants. L’Algérie et le Soudan privent une mère de ses droits de garde en cas de remariage, règle qui ne s’applique pas aux hommes en pareil cas.
Biens matrimoniaux et successions
Le droit des biens matrimoniaux est un autre domaine qui a fait l’objet de réformes considérables. L’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire, le Kenya et le Malawi ont introduit des dispositions légales en faveur de la répartition équitable des biens matrimoniaux. En Afrique du Sud, en Éthiopie, en Gambie et au Nigéria, les lois reconnaissent le droit des femmes mariées d’acquérir, de posséder, de conserver et de céder leurs propres biens.
Cependant, certaines lois coutumières et religieuses affaiblissent les droits successoraux des femmes. En Algérie, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, en Égypte, au Nigéria, au Soudan, au Soudan du Sud et en Tunisie, les femmes et les filles reçoivent moins en héritage que les hommes et les garçons.
Les femmes sont désavantagées par des préjugés culturels qui influencent les décisions judiciaires, les inégalités du partage successoral étant particulièrement manifestes dans les cas de divorce et de veuvage. Dans certains pays, les épouses peuvent être exclues d’hériter des biens de leur mari. On peut citer comme exemple l’Angola, où les lois coutumières excluent les épouses d’hériter des biens de leur mari décédé et où les veuves sont parfois forcées de quitter leur foyer conjugal.
Alignement du droit de la famille sur les normes internationales relatives aux droits humains
En Afrique, il est impératif que le droit de la famille s’aligne pleinement sur les normes internationales relatives aux droits humains. De nombreux pays ont ratifié des traités phares, comme la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEFDF) et le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes (Protocole de Maputo).Toutefois, la mise en œuvre et l'application de ces traités restent incohérentes, les lois et politiques familiales discriminatoires demeurant dans les statuts et les pratiques.
Comme le conclut Esther Waweru, « il est particulièrement préoccupant de constater que dans la plupart des pays où, dans leurs décisions, les autorités judiciaires nationales et les organes judiciaires de l’Union africaine ont explicitement appelé à une réforme du droit, les gouvernements se sont abstenus de procéder aux modifications demandées. Et même dans les cas où les lois sont équitables, il est fréquent que leur application soit inadéquate et défavorise les femmes et que ces dernières ignorent leurs droits devant la loi. »
« Pour protéger les femmes et les filles dans le cadre du droit de la famille, il est impératif que tous les pays africains adoptent sans tarder un cadre législatif et stratégique solide qui s’aligne sur leurs obligations internationales et régionales en matière de droits humains. »
Distribué par APO Group pour Equality Now.
Notes à l’intention des rédacteurs
Pour les demandes des médias, veuillez contacter
Tara Carey
responsable mondiale des médias
à l’adresse Tcarey@equalitynow.org
T. +44 (0)7971556340 (WhatsApp
À propos : Equality Now (www.EqualityNow.org)
Equality Now est une organisation internationale non gouvernementale de défense des droits humains qui travaille à protéger et promouvoir les droits des femmes et des filles à travers le monde en associant le militantisme local à l’assistance juridique aux niveaux international, régional et national.
Notre réseau international d’avocats, d’activistes et de partisans parvient à instaurer un changement juridique et systémique en tenant les gouvernements pour responsables de l’adoption et de l’application de lois et de politiques qui mettent un terme aux inégalités juridiques, au trafic sexuel, à l’exploitation sexuelle sur Internet, à la violence sexuelle et aux pratiques préjudiciables telles que les mutilations génitales féminines et les mariages d’enfants.
À propos : Réseau africain du droit de la famille (AFLN) (https://apo-opa.co/3WIuyu1) Gender Inquality in Family Laws in Africa: An Overview of Key Trends in Select Countries est une source de données essentielle pour éclairer les réformes juridiques, politiques et pratiques qui visent à mettre fin au sexisme et à la discrimination dans le droit de la famille en Afrique. Ce rapport sera utilisé par Equality Now, le Réseau africain du droit de la famille (AFLN) et ses partenaires pour faciliter le travail avec les organes politiques et judiciaires de l’Union africaine, en particulier le Rapporteur spécial sur les droits des femmes en Afrique, en vue d’influer sur les changements à apporter.
Le réseau AFLN a été lancé en octobre 2022 et vise à établir une alliance régionale en Afrique entre des défenseurs et des groupes nationaux afin de renforcer l’action collective et d’accélérer les efforts d’organisation et de mobilisation en faveur de la réforme du droit de la famille.
Le réseau AFLN est dirigé par les partenaires fondateurs Equality Now, le Réseau de développement et de communication des femmes africaines (FEMNET) (https://apo-opa.co/4dIjELa), Musawah (https://apo-opa.co/4dDsUjB) et l’Initiative stratégique pour les femmes de la Corne de l’Afrique (Réseau SIHA) (https://apo-opa.co/3ynVq8H).
Le réseau AFLN participe à la Campagne mondiale en faveur de l’égalité en droit de la famille (https://apo-opa.co/4bnXegv), qui appelle tous les États à assurer l’égalité des femmes et des hommes devant la loi dans toutes les questions relatives à la famille, indépendamment de la religion, de la culture et des traditions.
Les femmes en Afrique sont victimes de discrimination en matière de droit de la famille
Le caractère discriminatoire du droit de la famille peut avoir de profondes répercussions car il expose les femmes et les filles à un risque accru de violences sexuelles et basées sur le genre et accroît leur dépendance et leur vulnérabilité
NAIROBI, Kenya, 16 mai 2024/APO Group/ --
Partout en Afrique, la discrimination à l’égard des femmes et des filles reste répandue dans le droit de la famille, selon une nouvelle étude d’Equality Now (www.EqualityNow.org). Une analyse de 20 pays africains révèle que la discrimination sexuelle institutionnalisée dans les systèmes juridiques et les lois coutumières perpétue les inégalités entre les genres en matière de droits relatifs au mariage, au divorce, à la garde des enfants et à la propriété. Malgré d’importantes réformes juridiques, les progrès ont été lents, inégaux et entravés par des revers, un manque de volonté politique et des lacunes dans leur mise en œuvre.
Le rapport intitulé Gender Inequality in Family Laws in Africa: An Overview of Key Trends in Select Countries (https://apo-opa.co/3WGzZts) explique comment la présence de dispositions redondantes et contradictoires dans les cadres juridiques entrave l’interprétation et l’application du droit de la famille et soulève des difficultés complexes pour l’harmonisation des systèmes juridiques.
Le caractère discriminatoire du droit de la famille peut avoir de profondes répercussions car il expose les femmes et les filles à un risque accru de violences sexuelles et basées sur le genre et accroît leur dépendance et leur vulnérabilité, notamment par les limites qu’il impose à leurs opportunités économiques et à leur pouvoir de décision.
L’égalité totale en matière de droit de la famille n’est une réalité dans aucun des pays examinés, à savoir l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Angola, le Botswana, le Burundi, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, l’Éthiopie, la Gambie, le Kenya, le Malawi, le Mozambique, le Nigéria, la République démocratique du Congo (RDC), le Sénégal, le Soudan, le Soudan du Sud, la Tanzanie et la Tunisie.
La nécessité pressante de réformes juridiques profondes
L’Afrique abrite une multitude de groupes ethniques, linguistiques et religieux aux structures de droit de la famille variées. Historiquement, les communautés ont développé des systèmes complexes et profondément enracinés de lois coutumières qui régissent les relations familiales. L’adoption de systèmes juridiques et religieux européens a abouti à un pluralisme juridique composé de lois coutumières, de lois religieuses et de droit écrit qui continue de façonner la législation et la pratique.
Cette juxtaposition complexe subit en outre l’influence de dynamiques sociales en mutation. On constate parfois un empiètement, voire un conflit, entre le droit civil, le droit coutumier et le droit religieux, tel que le droit canonique islamique ou chrétien. De nombreuses dispositions du droit religieux et coutumier sont discriminatoires à l’égard des femmes et des filles.
Esther Waweru, co-auteure du rapport et conseillère juridique principale à Equality Now, explique cette situation : « la culture et la religion constituent souvent des obstacles majeurs dans la lutte en faveur de l’égalité en matière de droit de la famille, qui empêchent les réformes. Des clauses de retour en arrière et des pratiques rétrogrades atténuent les avancées positives de lois progressistes et on assiste à un retour de bâton de la part de mouvements anti-droits qui cherchent à réduire à néant les gains âprement acquis dans des domaines tels que l’élimination du mariage des enfants et des mutilations génitales féminines. »
« S’ajoute à cela le problème de l’immobilisme de la part des gouvernements, qui s’engagent à réformer des lois discriminatoires mais s’abstiennent de prendre des mesures qui vont dans ce sens. Dans certains cas, un sort incertain est réservé aux dispositions progressistes du droit de la famille en attente de promulgation. »
Des progrès en ce qui concerne le mariage des enfants, malgré des lacunes qui subsistent
Le mariage des enfants est l’un des rares domaines où des progrès notables ont été réalisés. L’interdiction absolue du mariage entre personnes de moins de 18 ans existe en Côte d’Ivoire, en Égypte, en Gambie, au Kenya, au Malawi, au Mozambique et en RDC. Cela dit, la persistance du mariage des enfants dans certaines communautés souligne bien la nécessité d’adopter une approche multisectorielle (https://apo-opa.co/3WJ05wa) qui prévoit des activités de sensibilisation aux conséquences néfastes et juridiques du mariage des enfants.
Il est inquiétant de constater qu’au Cameroun, au Nigéria, au Sénégal, au Soudan, au Soudan du Sud et en Tanzanie, le droit autorise toujours le mariage des enfants. Tandis qu’en Afrique du Sud, en Algérie, en Angola, au Botswana, au Burundi, en Éthiopie et en Tunisie, l’âge légal du mariage est de 18 ans, mais des exceptions sont autorisées.
Viol conjugal
Les pays doivent renforcer les mesures de protection contre la violence basée sur le genre, en particulier la violence entre partenaires intimes. Le viol conjugal n’est pas interdit en Algérie, au Kenya, en Gambie et au Soudan, tandis que le Code pénal du nord du Nigéria autorise le viol conjugal et les agressions « correctives » dans le mariage.
Le viol conjugal n’est criminalisé qu’à la séparation du couple en Tanzanie, et au Burundi, la peine est inférieure à 30 jours d’emprisonnement ou une amende. Le droit tunisien stipule qu’une épouse doit remplir ses devoirs conformément aux « us et coutumes », ce qui expose les femmes au risque de viol conjugal, car le rôle traditionnel de l’épouse consiste notamment à satisfaire les besoins sexuels de son mari.
Les tribunaux du Malawi ont déclaré que le viol n’existe pas dans le cadre du mariage. Le droit coutumier suppose le consentement perpétuel à des rapports sexuels dans le mariage, ce que le droit civil du Malawi semble confirmer en ne prévoyant que des circonstances limitées dans lesquelles une femme peut refuser à son mari des rapports sexuels, telles qu’un problème de santé ou en cas de séparation légale.
On peut saluer des pays comme l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et le Mozambique d’avoir explicitement criminalisé le viol conjugal. Il est impératif que tous les pays adoptent l’interdiction du viol conjugal, accompagnée de campagnes de sensibilisation et de services de soutien accessibles aux survivantes. En outre, l’application effective de la loi est cruciale, tout comme la dispense d’une formation complète aux agents des secteurs de la justice pénale, des soins de santé et des services sociaux.
Des pratiques de mariage discriminatoires
Dans la plupart des pays africains, l’enregistrement du mariage dans les registres de l’état civil est une exigence légale régie par des lois spécifiques d’officialisation du mariage. Les femmes mariées dans le cadre d’un mariage coutumier ou religieux sont plus exposées à des risques de discrimination car elles ne disposent pas de la même protection juridique que celles qui sont mariées dans le cadre d’un mariage civil. Il en va de même pour les partenaires de même sexe, dans la mesure où les mariages et les unions civiles sont principalement réservés aux couples hétérosexuels.
La polygamie est légalement autorisée au Cameroun, en Égypte, au Kenya, au Sénégal et au Soudan du Sud, les hommes ayant droit à quatre épouses au Soudan et au Sénégal. La monogamie est inscrite dans le droit écrit de l’Afrique du Sud, de la Côte d’Ivoire et du Mozambique, mais les lois et pratiques coutumières et religieuses continuent de reconnaître la polygamie sans accorder de protection adéquate aux femmes mariées dans le cadre d’un mariage polygame. D’autres pratiques traditionnelles néfastes, telles que l’héritage des veuves et le mariage de substitution, traitent les femmes comme des biens.
Discrimination dans les lois relatives au divorce et à la garde des enfants
Des pays comme le Soudan ont des lois discriminatoires, qui accordent aux maris de plus grands pouvoirs pour introduire une demande de divorce. En Algérie, les femmes ne peuvent demander le divorce qu’en cas d’abandon, de violation du contrat de mariage ou de non-paiement de la pension alimentaire. Au Soudan et en Égypte, dans certains cas de divorce sans faute, la femme doit verser une indemnité financière à son ex-mari.
Les lois sur la garde des enfants ont été réformées en Angola, au Botswana, au Burundi, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, au Mozambique, en RDC et au Sénégal, et garantissent des droits de tutelle aux deux parents, quel que soit leur statut matrimonial.
La discrimination sexuelle subsiste dans des pays comme le Sénégal, où le père est le tuteur légal, quel que soit le rôle de la mère à s’occuper des enfants. En Tunisie et en Algérie, les pères conservent la tutelle légale même si la mère a la garde des enfants. L’Algérie et le Soudan privent une mère de ses droits de garde en cas de remariage, règle qui ne s’applique pas aux hommes en pareil cas.
Biens matrimoniaux et successions
Le droit des biens matrimoniaux est un autre domaine qui a fait l’objet de réformes considérables. L’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire, le Kenya et le Malawi ont introduit des dispositions légales en faveur de la répartition équitable des biens matrimoniaux. En Afrique du Sud, en Éthiopie, en Gambie et au Nigéria, les lois reconnaissent le droit des femmes mariées d’acquérir, de posséder, de conserver et de céder leurs propres biens.
Cependant, certaines lois coutumières et religieuses affaiblissent les droits successoraux des femmes. En Algérie, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, en Égypte, au Nigéria, au Soudan, au Soudan du Sud et en Tunisie, les femmes et les filles reçoivent moins en héritage que les hommes et les garçons.
Les femmes sont désavantagées par des préjugés culturels qui influencent les décisions judiciaires, les inégalités du partage successoral étant particulièrement manifestes dans les cas de divorce et de veuvage. Dans certains pays, les épouses peuvent être exclues d’hériter des biens de leur mari. On peut citer comme exemple l’Angola, où les lois coutumières excluent les épouses d’hériter des biens de leur mari décédé et où les veuves sont parfois forcées de quitter leur foyer conjugal.
Alignement du droit de la famille sur les normes internationales relatives aux droits humains
En Afrique, il est impératif que le droit de la famille s’aligne pleinement sur les normes internationales relatives aux droits humains. De nombreux pays ont ratifié des traités phares, comme la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEFDF) et le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes (Protocole de Maputo).Toutefois, la mise en œuvre et l'application de ces traités restent incohérentes, les lois et politiques familiales discriminatoires demeurant dans les statuts et les pratiques.
Comme le conclut Esther Waweru, « il est particulièrement préoccupant de constater que dans la plupart des pays où, dans leurs décisions, les autorités judiciaires nationales et les organes judiciaires de l’Union africaine ont explicitement appelé à une réforme du droit, les gouvernements se sont abstenus de procéder aux modifications demandées. Et même dans les cas où les lois sont équitables, il est fréquent que leur application soit inadéquate et défavorise les femmes et que ces dernières ignorent leurs droits devant la loi. »
« Pour protéger les femmes et les filles dans le cadre du droit de la famille, il est impératif que tous les pays africains adoptent sans tarder un cadre législatif et stratégique solide qui s’aligne sur leurs obligations internationales et régionales en matière de droits humains. »
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Equality Now est une organisation internationale non gouvernementale de défense des droits humains qui travaille à protéger et promouvoir les droits des femmes et des filles à travers le monde en associant le militantisme local à l’assistance juridique aux niveaux international, régional et national.
Notre réseau international d’avocats, d’activistes et de partisans parvient à instaurer un changement juridique et systémique en tenant les gouvernements pour responsables de l’adoption et de l’application de lois et de politiques qui mettent un terme aux inégalités juridiques, au trafic sexuel, à l’exploitation sexuelle sur Internet, à la violence sexuelle et aux pratiques préjudiciables telles que les mutilations génitales féminines et les mariages d’enfants.
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Gender Inquality in Family Laws in Africa: An Overview of Key Trends in Select Countries est une source de données essentielle pour éclairer les réformes juridiques, politiques et pratiques qui visent à mettre fin au sexisme et à la discrimination dans le droit de la famille en Afrique. Ce rapport sera utilisé par Equality Now, le Réseau africain du droit de la famille (AFLN) et ses partenaires pour faciliter le travail avec les organes politiques et judiciaires de l’Union africaine, en particulier le Rapporteur spécial sur les droits des femmes en Afrique, en vue d’influer sur les changements à apporter.
Le réseau AFLN a été lancé en octobre 2022 et vise à établir une alliance régionale en Afrique entre des défenseurs et des groupes nationaux afin de renforcer l’action collective et d’accélérer les efforts d’organisation et de mobilisation en faveur de la réforme du droit de la famille.
Le réseau AFLN est dirigé par les partenaires fondateurs Equality Now, le Réseau de développement et de communication des femmes africaines (FEMNET) (https://apo-opa.co/4dIjELa), Musawah (https://apo-opa.co/4dDsUjB) et l’Initiative stratégique pour les femmes de la Corne de l’Afrique (Réseau SIHA) (https://apo-opa.co/3ynVq8H).
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