Source: United Nations Office at Geneva (UNOG) |

Le Comité des disparitions forcées examine le rapport du Sénégal

Le Sénégal est toutefois engagé depuis dix ans dans une réforme de son Code pénal qui doit comporter une section consacrée aux disparitions forcées avec leur incrimination et qui devrait être adoptée cette année

GENEVA, Suisse, 8 mars 2017/APO/ --

Le Comité des disparitions forcées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial présenté par le Sénégal sur les mesures qu'il a prises pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.  
 

Présentant ce rapport, M. Coly Seck, Représentant permanent du Sénégal auprès des Nations Unies à Genève, a reconnu que tout en étant conforme à la majorité des exigences de la Convention, le droit sénégalais ne reconnaissait pas encore une incrimination spécialement dédiée au crime de disparition forcée. Le Sénégal est toutefois engagé depuis dix ans dans une réforme de son Code pénal qui doit comporter une section consacrée aux disparitions forcées avec leur incrimination et qui devrait être adoptée cette année. M. Seck a souligné que les acteurs de la société civile, au travers en particulier du Conseil consultatif national des droits de l'homme, avaient été associés à l'élaboration du rapport.  

Dès son indépendance, le Sénégal a «choisi de bâtir un État de droit, d'instaurer la démocratie, de favoriser la promotion et la protection des libertés et droits fondamentaux de la personne», a-t-il rappelé. Cet engagement démocratique a été illustré par la deuxième alternance politique en une décennie ayant eu lieu en 2012 avec l'élection du Président Macky Sall, en dépit des actes de violence qui ont émaillé la campagne électorale.

C'est dans le cadre de cette approche qu'a été signé, également en 2012, l'accord entre le Sénégal et l'Union africaine, portant création des chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises chargées de poursuivre les principaux responsables des crimes et violations graves du droit international.  Cet accord a ainsi permis de traduire en justice l'ancien Président tchadien Hissène Habré. Des mesures sont également en cours contre la fraude et la corruption, ainsi que celles pour la sécurité des personnes dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.  

M. Seck a évoqué, par ailleurs, le référendum constitutionnel de 2016 qui a notamment rétabli le quinquennat pour le mandat présidentiel.  

Dans le contexte des réformes, le Sénégal a notamment mis sur pied l'Observatoire national des lieux de privation de liberté, une autorité administrative indépendante. Le pays veille également à améliorer, dans la législation et la pratique, l'égalité hommes-femmes, par des amendements au Code de la nationalité, entre autres, et la présence de 43% de députées au Parlement, a encore affirmé M. Seck en cette Journée internationale de la femme.  

La délégation du pays était également composée du Directeur des droits humains au Ministère de la justice; de celui des libertés publiques au Ministère de l'intérieur et de la sécurité publique; d'un haut fonctionnaire du Ministère des affaires étrangères et des Sénégalais de l'extérieur; ainsi que de diplomates de la Mission permanente du Sénégal auprès des Nations Unies à Genève.

Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de la réforme du Code pénal et du Code de procédure pénale; de la reconnaissance de la compétence du Comité sur les «communications individuelles» (plaintes); de la création d'une institution nationale des droits de l'homme et du rôle du Comité sénégalais des droits de l'homme; de la participation de la société civile; de la position du Sénégal envers la remise en cause par l'Union africaine de la Cour pénale internationale; de la loi d'amnistie de 2004; de la possibilité de saisir directement la Cour suprême; de la réglementation de la garde à vue; de la création d'une banque de données génétiques; de la formation des forces de sécurité aux droits de l'homme; des possibilités d'obtenir réparation pour toute personne ayant souffert d'une infraction; ainsi que de la problématique des enlèvements d'enfants et des cas d'adoption illicite.  

Le corapporteur du Comité pour l'examen des rapports, M. Emmanuel Decaux, a  estimé que les bonnes pratiques qui devraient se concrétiser avec le nouveau Code pénal constitueraient un exemple pour les pays jouissant d'institutions similaires. M. Decaux a estimé qu'il serait exemplaire que le Sénégal adopte les procédures facultatives recommandées par la Convention. Il s'est interrogé sur la participation concrète des organisations de la société civile à l'élaboration du rapport, alors que le Sénégal est l'un des pays comptant des ONG nombreuses et dynamiques.

Pour sa part, la corapporteuse du Comité pour le Sénégal, Mme Suela Janina, s'est interrogée sur les délais de prescription pour un crime: la disparition forcée, qui ne figure pas formellement dans le Code pénal. Elle estime nécessaire que le Sénégal réfléchisse au problème posé par le caractère continu du crime de disparition forcée, ce qui pose le problème de la prescription. Le délai de prescription ne peut débuter qu'à partir du moment où le crime est élucidé, autrement dit lorsque l'on sait ce qu'il est advenu à la victime, a-t-elle rappelé. Par ailleurs, a été abordée la question de l'amnistie de 2004 pour les troubles survenus en Casamance, des membres du Comité s'inquiétant du fait que cela ait pu empêcher des victimes de demander réparation en justice.

Dans sa déclaration de conclusion, le Chef de la délégation sénégalaise a assuré que «les résultats de l'examen feraient l'objet d'une large diffusion auprès de tous les acteurs étatiques et non-étatiques concernés afin de trouver avec eux les voies et moyens d'une mise en œuvre diligente».

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l'État-partie, qu'il rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux vendredi 17 mars.

Cet après-midi et demain matin, le Comité procèdera à l'examen du rapport initial de l'Équateur.  

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