Source: United Nations Office at Geneva (UNOG) |

Le comité des droits de l’enfant examine le rapport de la République Centrafricaine

La délégation centrafricaine était dirigée par M. Flavien Mbata, Ministre de la justice, Garde des sceaux, chargé des droits de l’homme, ainsi que de différents experts dans le domaine de l’enfance

GENEVA, Suisse, 23 janvier 2017/APO/ --

Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd’hui le rapport périodique présenté par la République centrafricaine sur les mesures prises par le pays pour donner effet aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.
 

Présentant ce rapport, Mme Virginie Mbaikoua, Ministre des affaires sociales et de la réconciliation nationale de la République centrafricaine, a expliqué que malheureusement, avec la crise de 2012 à 2016, les enfants ont vu leurs droits se dégrader considérablement et leur état de vulnérabilité s’aggraver. Néanmoins, après le retour à l’ordre et les élections de 2016, la promotion des droits humains des personnes vulnérables – et plus particulièrement des enfants – a reçu un rang de priorité, a-t-elle ajouté. Mme Mbaikoua a en outre souligné qu’une série de mesures avaient été prises au niveau politique pour assurer la paix et la réconciliation dans le pays. Elle a ensuite souligné que les efforts du Gouvernement en matière de santé ont en particulier porté sur la lutte contre la mortalité maternelle et infantile, ainsi que sur la santé reproductive.
 
En 2016, a poursuivi Mme Mbaikoua, des mesures d’envergure ont été prises contre les occupations illégales d’écoles par les groupes armées, afin de garantir aux enfants une scolarisation effective et gratuite.  Entre 2015 et 2016, a-t-elle ajouté, quelque 204 espaces temporaires d’apprentissage et de protection de l’enfant ont été établis; ces espaces ont accueilli plus de 30 000 enfants réfugiés et déplacés, a-t-elle précisé. La Ministre des affaires sociales et de la réconciliation nationale a par ailleurs souligné que la législation centrafricaine punit sévèrement les abus sexuels sur mineur.  De plus, a-t-elle fait valoir, des avancées législatives ont permis de mieux protéger et défendre les droits des enfants pygmées et des peuples autochtones. La Ministre a ensuite expliqué que les dix groupes armées signataires de l’accord de Brazzaville se sont engagés à renoncer à recruter des enfants et à libérer ceux qui se trouvent en leur sein.
 
Mme Mbaikoua a reconnu qu’il restait encore à la République centrafricaine des efforts à fournir dans le domaine de la protection de l’enfance. Elle a notamment évoqué l’absence de brigade pour mineurs dans les provinces; l’existence d’un seul quartier pour mineurs en milieu carcéral; l’absence de prise en charge des enfants considérés comme sorciers; l’absence de politique contre le mariage des enfants;  ou encore l’absence de programme de prise en charge des enfants victimes de violences sexuelles. Il s’agit des plus grands défis auxquels est confrontée la République centrafricaine en matière de droits de l’enfant, a conclu la Ministre.
 
La délégation centrafricaine était dirigée par M. Flavien Mbata, Ministre de la justice, Garde des sceaux, chargé des droits de l’homme, ainsi que de différents experts dans le domaine de l’enfance.  Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s’agissant, notamment, des crimes graves commis durant le conflit contre des enfants sur tout le territoire du pays ; des crimes sexuels ont été commis par des contingents de pays étrangers; des enfants considérés comme sorciers; de l’enregistrement des naissances; des mariages forcés et précoces; de la répression de la torture exercée par des agents de police contre des enfants; des questions de santé et d’éducation; des enfants handicapés; des questions d’adoption; du travail des enfants; de la prise en charge des enfants enrôlés durant le conflit; ou encore du nouveau projet de loi sur la protection de l’enfance.        
 
Une experte du Comité s’est notamment réjouie que, malgré la crise, le pays ait mis en œuvre beaucoup de plans nationaux intéressant les droits de l’enfant. Elle a toutefois souligné qu’il y avait beaucoup de discriminations de fait en République centrafricaine, en dépit du cadre législatif existant. Le droit à la vie et le droit au développement de l’enfant ont été bafoués ces dernières années, a-t-elle ajouté.  Durant les périodes d’instabilité, les violences sexuelles à l’encontre des enfants ont été systématiques, y compris de la part des forces de maintien de la paix, a-t-elle poursuivi.
 
Un autre expert a souligné que le Code de la famille devrait être révisé, notamment pour ce qui est de la disposition prévoyant la possibilité de se marier avec un mineur. Les mariages forcés sont encore une réalité dans certaines régions de la République centrafricaine, a-t-il insisté. Un autre membre du Comité a fait part de sa préoccupation face au faible taux d’enregistrement des naissances. Une experte s’est enquise des mesures prises pour en finir avec la torture exercée contre des enfants dans les postes de police. 
 
Selon les rapports de certaines ONG, la situation des enfants handicapés est terrible en République centrafricaine, a pour sa part fait observer un expert, relevant que 85% des enfants handicapés n’auraient jamais été à l’école. Ce même expert s’est en outre inquiété des taux de mortalité infantile et de malnutrition très élevés dans le pays. 
 
Des préoccupations ont également été exprimées au sujet de la présence de nombreux enfants dans les différents groupes armés et ce, en dépit des dispositions de l’Accord de paix. En outre, les pires formes de travail sont une réalité pour de nombreux enfants dans les entreprises minières et les exploitations agricoles du pays, a-t-il été souligné. Une experte a relevé qu’il y avait des enlèvements de filles dans les camps de réfugiés pour les destiner au commerce sexuel et des enlèvements de jeunes garçons pour les enrôler dans les groupes armés.  A en outre été déplorée l’absence de justice spécifique pour mineurs.
 
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la République centrafricaine et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 3 février prochain.

Mardi prochain, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du rapport périodique présenté par la Serbie  au titre de la Convention.

Présentation du rapport de la République centrafricaine

Le Comité est saisi du rapport de la République centrafricaine ainsi que des réponses du pays (en anglais et en arabe) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité.
 
Présentant ce rapport, MME VIRGINIE MBAIKOUA,  Ministre des affaires sociales et de la réconciliation nationale de la République centrafricaine, a expliqué que malheureusement, avec la crise de 2012 à 2016, les enfants ont vu leurs droits se dégrader considérablement et leur état de vulnérabilité s’aggraver.  Néanmoins, la Ministre a souligné qu’après le retour à l’ordre et les élections de 2016, la promotion des droits humains des personnes vulnérables – et plus particulièrement des enfants – a reçu un rang de priorité.
 
La Ministre a présenté une série de mesures prises en vue d’harmoniser les instruments nationaux aux normes internationales relatives aux droits de l’enfant, attirant notamment l’attention sur la ratification par la République centrafricaine de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant et du Protocole facultatif sur l’implication des enfants dans les conflits armés.   Mme Mbaikoua a en outre souligné qu’une série de mesures avaient été prises au niveau politique pour assurer la paix et la réconciliation dans le pays.   
 
La Ministre a ensuite souligné que les efforts du Gouvernement en matière de santé ont en particulier porté sur la lutte contre la mortalité maternelle et infantile, ainsi que sur l’adoption de feuilles de route et d’une politique nationale s’agissant de santé reproductive.
 
En 2016, a poursuivi Mme Mbaikoua, des mesures d’envergure ont été prises contre les occupations illégales d’écoles par les groupes armées, afin de garantir aux enfants une scolarisation effective et gratuite.  Entre 2015 et 2016, a-t-elle ajouté, quelque 204 espaces temporaires d’apprentissage et de protection de l’enfant ont été établis; ces espaces ont accueilli plus de 30 000 enfants réfugiés et déplacés, a-t-elle précisé.
 
La Ministre des affaires sociales et de la réconciliation nationale a par ailleurs souligné que la législation centrafricaine punit sévèrement les abus sexuels sur mineur.  A d’autre part été mis en place un programme d’assistance médicale et de prise en charge psychosociale et juridique, ainsi que de réparation à l’intention des enfants victimes d’abus sexuel. 
 
De plus, a fait valoir Mme Mbaikoua, des avancées législatives ont permis de mieux protéger et défendre les droits des enfants pygmées et des peuples autochtones.
 
La Ministre a ensuite expliqué que les dix groupes armées signataires de l’accord de Brazzaville se sont engagés à renoncer à recruter des enfants et à libérer ceux qui se trouvent en leur sein.  Des mesures sont prises pour mettre en œuvre cet accord avec, notamment, l’appui du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a précisé Mme Mbaikoua.
 
Mme Mbaikoua a reconnu qu’il restait encore à la République centrafricaine des efforts à fournir dans le domaine de la protection de l’enfance.  Elle a notamment évoqué l’absence de brigade pour mineurs dans les provinces; l’existence d’un seul quartier pour mineurs en milieu carcéral; l’absence de prise en charge des enfants considérés comme sorciers; l’absence de politique contre le mariage des enfants;  ou encore l’absence de programme de prise en charge des enfants victimes de violences sexuelles.  Il s’agit des plus grands défis auxquels est confrontée la République centrafricaine en matière de droits de l’enfant, a conclu la Ministre.
 
Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

Le Comité avait réparti les questions à traiter entre cinq de ses membres faisant office de corapporteurs dans le cadre d'un groupe de travail (task force) chargé de l'examen des rapports de la République centrafricaine.
 
Une experte membre de cette équipe de corapporteurs a salué la justesse du rapport qui pointe avec honnêteté les faiblesses du pays.  Elle a demandé ce qui avait été envisagé pour épauler et renforcer les capacités du Ministère des affaires sociales, lequel est chargé du suivi de la mise en œuvre de la Convention. Cette même experte s’est ensuite réjouie que, malgré la crise, le pays ait mis en œuvre beaucoup de plans nationaux intéressant les droits de l’enfant.  Elle a souhaité savoir quel était le bilan de ces divers plans et ce qui avait été prévu pour améliorer la « Commission nationale de suivi de la Convention des droits de l’enfant (CNSDE) ».  Elle s’est notamment enquise des mesures prises pour assurer l’indépendance de cette Commission.  Elle a en outre souhaité savoir ce qui a été fait pour améliorer la collecte de données dans le pays.
 
La corapporteuse s’est ensuite enquise du cadre légal régissant le travail des organisations non gouvernementales (ONG).  Elle a souligné qu’il y avait beaucoup de discriminations de fait en République centrafricaine, en dépit du cadre législatif existant. Elle a donc souhaité que les autorités centrafricaines fassent preuve d’un intérêt tout particulier pour cette question.
 
L’experte a d’autre part souhaité savoir comment l’État défendait l’intérêt supérieur de l’enfant.  Comment l’opinion des enfants est-elle prise en considération au sein de la famille et de la société, a-t-elle demandé?  Le droit à la vie et le droit au développement de l’enfant ont été bafoués ces dernières années, a-t-elle poursuivi, avant de s’enquérir des mesures prises pour poursuivre les auteurs des crimes commis contre les enfants. 
 
L’experte a aussi souhaité savoir comment les autorités luttaient contre la mortalité infantile.
 
Durant les périodes d’instabilité, les violences sexuelles à l’encontre des enfants ont été systématiques, y compris de la part des forces de maintien de la paix, a poursuivi la corapporteuse.  Elle a souhaité savoir quelles mesures les autorités comptaient prendre pour mettre fin à cette situation et prendre en charge ces enfants. Dans ce cadre, elle a souhaité savoir si la ligne téléphonique pour les enfants était connue et si les enfants victimes de violences sexuelles étaient pris en charge psychologiquement et socialement.
 
Un autre expert du Comité membre du groupe de corapporteurs, a relevé que la République centrafricaine avait signé toute une série d’instruments internationaux et a souhaité savoir si le pays comptait adhérer au troisième Protocole facultatif se rapportant à la Convention, qui établit une procédure de plaintes (communications).  Ce même expert a en outre affirmé que les motifs de discrimination spécifiquement prohibés dans la loi centrafricaine n’étaient pas suffisants. Ce même expert a ensuite souligné que le Code de la famille devrait être révisé, notamment pour ce qui est de la disposition prévoyant la possibilité de se marier avec un mineur.  L’expert a d’autre part souhaité savoir si la stratégie nationale de protection de l’enfance disposait d’un budget propre ou si elle était dépendante des fonds internationaux.  Il a demandé à la délégation s’il existait une réglementation applicable aux entreprises privées afin de les amener à respecter l’ensemble des droits des enfants – et pas seulement l’interdiction du travail des enfants.  Ce corapporteur a fait observer que si la définition de l’enfant couvre toutes les personnes de moins de 18 ans, il semble que cette limite d’âge ne soit pas respectée en ce qui concerne, notamment, le mariage.  Les mariages forcés sont encore une réalité dans certaines régions de la République centrafricaine, a-t-il insisté.
 
Un autre expert s’est enquis des mesures prises pour améliorer l’enregistrement des naissances et garantir la gratuité de la procédure.  Il s’est montré préoccupé par le faible taux d’enregistrement des naissances et par les disparités existantes en la matière entre zones rurales et zones urbaines. Ce même expert a par ailleurs déploré qu’aucun texte spécifique ne garantisse la liberté d’expression et d’association pour les enfants.  Il s’est enquis des mesures envisagées pour créer des espaces de dialogue avec les enfants et s’assurer que ces derniers participent à la construction de la paix dans leur pays.
 
Une experte s’est enquise des mesures prises pour en finir avec la torture exercée contre des enfants dans les postes de police.  Qu’en est-il par ailleurs des plans prévus pour assister les enfants soldats, les victimes de la guerre et les enfants sorciers qui ont eux-aussi subi des actes de torture, a-t-elle demandé?  Elle a en outre souhaité savoir comment les autorités luttaient contre les mutilations génitales et contre les violences sexuelles à l’encontre des enfants handicapés.  Quelles mesures ont-elles été prises pour lutter contre les châtiments corporels et contre les violences exercées à l’encontre des albinos, a-t-elle également demandé?
 
Qu’en est-il de la poursuite du travail parlementaire concernant le nouveau projet de loi sur la protection de l’enfance, a-t-il d’autre part été demandé?  Ce texte tel que remanié va-t-il interdire explicitement les châtiments corporels?
 
Un expert s’est enquis de ce qui a été prévu concrètement pour lutter contre le mariage forcé.
 
Qu’en est-il des opportunités offertes aux enfants d’exprimer leurs souffrances et leurs projets d’avenir, a-t-il par ailleurs été demandé?
 
Une experte s’est inquiétée de la persistance, au sein des familles, des clichés et stéréotypes liés au genre.  Quelles sont les mesures prises pour lutter contre les stéréotypes, a-t-elle demandé?  Elle a en outre souhaité savoir ce qui était fait pour assurer une meilleure prise en charge des enfants privés de milieu familial.  Cette même experte s’est ensuite enquise de ce qui était fait concrètement pour améliorer le taux de scolarisation et la qualité de l’enseignement. Elle a souhaité savoir ce qu’il en était de l’effectivité de la gratuité de l’enseignement dans les écoles publiques.  Quelle est la part de la coopération internationale dans le secteur de l’éducation, a-t-elle également demandé?
 
Un autre expert a regretté le manque de données concernant les enfants handicapés. Selon les rapports de certaines ONG, la situation des enfants handicapés est terrible en République centrafricaine, a-t-il poursuivi, relevant par exemple que 85% des enfants handicapés n’auraient jamais été à l’école. Ces enfants sont stigmatisés, a-t-il insisté, avant d’inviter les autorités à améliorer la collecte des données et à renforcer le dépistage.  Il faut créer un système d’éducation inclusive, a souligné l’expert.  Il a souhaité savoir si des campagnes de sensibilisation avaient été organisées contre les discriminations à l’égard de ces enfants handicapés.
 
Ce même expert s’est en outre inquiété des taux de mortalité infantile et de malnutrition très élevés dont pâtit la République centrafricaine.  Il s’est enquis des résultats de la stratégie de lutte contre la malnutrition et s’est interrogé sur les mesures prises pour promouvoir l’allaitement maternel.  Un plan a-t-il été mis en œuvre pour reconstruire les centres de soins de santé, a-t-il demandé?   La couverture vaccinale est très faible, a par ailleurs relevé ce membre du Comité, s’interrogeant sur les mesures prises pour améliorer la situation. Est-il vrai que seuls les fonctionnaires et les salariés du privé qui ont cotisé ont accès à la sécurité sociale, a-t-il d’autre part demandé?  Il s’est en outre enquis de la stratégie adoptée pour permettre un meilleur accès à l’eau potable. Qu’en est-il par ailleurs de la situation des enfants dont la mère est en prison?
 
Quelles mesures ont-elles été prises contre le trafic d’enfants et le Comité national des adoptions va-t-il être remis en service, a poursuivi l’expert?  La République centrafricaine a-t-elle prévu d’adhérer à la Convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale? 
 
Le même expert s’est dit préoccupé par la présence de nombreux enfants dans les différents groupes armés et ce, en dépit des dispositions de l’Accord de paix.  Il a souhaité savoir quelle stratégie avait été adoptée pour permettre la démobilisation des enfants soldats. L’expert a d’autre part relevé que l’âge minimum pour le travail des enfants était fixé à 14 ans et que l’âge de la scolarité obligatoire allait jusqu’à 16 ans.  Aussi, a-t-il souhaité savoir si les autorités centrafricaines envisageaient de réviser le Code du travail afin de faire en sorte que l’âge minimum d’admission à l’emploi ne soit pas inférieur à celui de la fin de l’obligation scolaire. L’expert a déclaré que les pires formes de travail étaient une réalité pour de nombreux enfants dans les entreprises minières et les exploitations agricoles du pays.  Il s’est par ailleurs enquis des procédures judiciaires suivies contre les auteurs de la traite de personnes et de l’assistance prévue pour les enfants qui en sont victimes.
 
Une experte a relevé qu’il y avait des enlèvements de filles dans les camps de réfugiés pour les destiner au commerce sexuel et des enlèvements de jeunes garçons pour les enrôler dans les groupes armés.  Cette même experte a par ailleurs demandé si les autorités avaient pris des mesures particulières pour permettre aux enfants déplacés d’avoir accès aux soins de santé et à l’éducation. Elle a en outre déploré l’absence de justice spécifique pour mineurs dans le pays et a demandé si des alternatives à la détention des enfants étaient possibles en République centrafricaine. Cette même experte a demandé si des dispositifs étaient prévus pour protéger les enfants témoins ou victimes de violences.
 
Une experte s’est inquiétée de l’information laissant apparaître que dans certains écoles, des droits d’inscriptions sont demandés pour payer les enseignants, sans quoi l’élève ne peut pas assister aux cours.
 
Un expert a souligné que beaucoup d’enfants vivaient dans les rues, notamment en raison du conflit, et a souhaité savoir si des mesures avaient été prises par le Gouvernement pour lutter contre ce phénomène.

Quels sont les critères encadrant les dérogations qui permettent aux mineurs de se marier avant 18 ans, a demandé une experte?  Faisant observer que ces mariages précoces ne peuvent avoir lieu sans l’accord des parents, elle s’est inquiétée de la possibilité que cette disposition entraîne des mariages forcés. 
 
Un expert s’est enquis de la sécurité dans les hôpitaux de Centrafrique, certains ayant été visés par les violences.
 
Réponses de la delegation
 
La délégation a expliqué que des crimes graves avaient été commis sur tout le territoire contre des enfants. Elle a souligné que le pays avait des ressources très limitées, raison pour laquelle la République centrafricaine s’est dotée d’une Cour pénale spéciale – une cour hybride composée de magistrats nationaux et internationaux – afin de juger l’ensemble des crimes commis durant le conflit, y compris ceux commis contre les enfants.  Les juges de cette Cour sont en train d’être désignés et le dispositif d’enquête devrait être opérationnel dans le courant de l’année 2017, a précisé la délégation.
 
En République centrafricaine, des crimes sexuels ont été commis par des contingents de pays étrangers : France, Géorgie, Congo-Brazzaville, République démocratique du Congo, Burundi et Rwanda, notamment, a poursuivi la délégation.  Ce sont les pays d’origine de ces contingents qui doivent lancer les procédures d’enquêtes et judiciaires contre leurs ressortissants, a-t-elle déclaré.  Certains pays, comme la France, ont commencé leurs enquêtes en République centrafricaine, a-t-elle souligné.  La délégation a toutefois regretté que la France ait classé sans suite certaines plaintes à l’encontre de certains de ses ressortissants malgré les preuves glanées sur le terrain.
 
Rappelant ensuite que le mandat des membres de la Commission nationale de suivi des droits de l’enfant (CNSDE) était arrivé à terme, la délégation a indiqué que la tendance était désormais de créer un seul comité chargé de l’ensemble des droits de l’homme.
 
La délégation a par ailleurs souligné qu’une base de données globale allait être créée en 2017. Elle devrait permettre d’avoir une vision plus globale et plus précise de la situation des droits de l’enfant dans le pays.
 
La délégation a d’autre part expliqué qu’il y avait eu beaucoup d’activités culturelles et de campagnes de sensibilisation contre les discriminations depuis la fin du conflit ; elles doivent permettre une coexistence pacifique entre les différentes communautés, a-t-elle souligné.
 
L’opinion de l’enfant n’est actuellement pas forcément prise en compte, mais les mentalités évoluent, a déclaré la délégation, assurant que les autorités ont pris conscience de l’intérêt d’écouter les enfants.  Les enfants peuvent s’exprimer dans le cadre de certaines émissions radiophoniques, a en outre fait observer la délégation. Les enfants sont de plus en plus incités à donner leur avis et à exprimer leurs opinions au sein de l’école, a-t-elle ajouté.
 
Le numéro vert est aujourd’hui opérationnel, mais il est davantage utilisé par les femmes que par les enfants victimes de violences, a ensuite indiqué la délégation.  Les autorités tentent de mieux faire connaître ce numéro parmi les jeunes, a-t-elle ajouté.
 
La délégation a expliqué que les autorités avaient prévu de créer un centre holistique pour prendre en charge les femmes et les enfants victimes de violences qui ont besoin de soutien psychologique.
 
Le budget pour le bien-être des enfants devrait être augmenté durant les prochaines années, a d’autre part indiqué la délégation.
 
Le châtiment corporel en milieu scolaire et au sein des familles est pratiquement interdit, même s’il faut encore changer les mentalités, a poursuivi la délégation.  La nouvelle loi de protection de l’enfance devrait interdire totalement les châtiments corporels, a-t-elle précisé.
 
Des ONG travaillent à la sensibilisation des femmes contre les mutilations génitales, a d’autre part indiqué la délégation.
 
La Commission nationale contre les mutilations génitales féminines ne fonctionne plus depuis 2013, a par la suite rappelé la délégation. Avec le retour à l’ordre dans le pays, certaines structures sont remises en place pour répondre aux besoins de la population. Cette Commission devrait donc être réactivée prochainement, a indiqué la délégation.
 
Le taux de mariages forcés et précoces est de 60% dans le pays. Conscient des graves problèmes que pose cette situation, le Gouvernement prévoit un plan d’action global contre cette pratique. Ce plan va mettre l’accent sur la sensibilisation, a indiqué la délégation. Elle a par ailleurs souligné que le Gouvernement avait prévu d’amender l’ensemble des dispositions du Code de la famille qui sont en contradiction avec les engagements internationaux du pays.

Pour pouvoir se marier avant l’âge légal de 18 ans, deux conditions sont nécessaires : l’accord des parents et celui du procureur de la République, a ensuite précisé la délégation.  Elle a reconnu que l’exigence de l’accord des parents pouvait constituer une «porte ouverte» aux mariages forcés. Cependant, la délégation a assuré qu’un mariage précoce pouvait également constituer une protection sociale dans les cas de grossesses précoces.
 
L’enregistrement à la naissance est une priorité pour le Gouvernement, a également souligné la délégation. Le délai pour procéder à cet enregistrement a été prolongé d’un mois, a-t-elle fait valoir.  Une campagne doit permettre d’enregistrer tous les enfants qui ne l’ont pas été à la naissance afin qu’ils puissent s’inscrire à l’école, a-t-elle précisé.
 
La délégation a ensuite précisé que les autorités ne pouvaient pas rendre gratuite la procédure d’enregistrement des naissances en raison des contraintes financières. Ces revenus font partis du budget de l’État, a-t-elle rappelé.  La délégation a en outre souligné qu’il était difficile pour les Peuls et les Pygmées de faire enregistrer les naissances de leurs enfants car ce sont des peuples sédentaires.
 
Le phénomène des enfants (considérés comme) sorciers est grandissant dans le pays, a par ailleurs reconnu la délégation.  Sous la pression, certaines personnes sont obligées de faire des aveux pour confirmer qu’ils sont sorciers, a-t-elle expliqué. Ce problème a été pris en compte par le Gouvernement.  Une réflexion a lieu actuellement, avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), afin de lutter contre ce phénomène. Le problème est très sérieux; des enfants sont torturés et tués en République centrafricaine parce qu’ils sont considérés comme sorciers, a insisté la délégation.
 
Le projet de loi sur la protection de l’enfance va être retiré du Parlement pour être réécrit en tenant compte de la nouvelle situation dans le pays, a d’autre part indiqué la délégation.
 
La question de la règlementation des entreprises est très importante, a par ailleurs déclaré la délégation, soulignant que le Centrafrique prévoit un afflux d’entreprises privées. C’est pourquoi il faut une législation stricte de protection des enfants à l’intention des entreprises.
 
La délégation a expliqué que les autorités de Centrafrique avaient prévu une prise en charge globale des enfants enrôlés durant le conflit, afin de leur permettre une meilleure réintégration dans la société et ce, en tenant compte des spécificités des garçons et des jeunes filles.

Concernant la prise en charge psychologique et sociale des enfants, la délégation a indiqué ne pas disposer de personnel soignant compétent concernant les programmes psychosociaux. Les personnes traumatisées et ayant subi des violences doivent pourtant être prises en charge, a-t-elle reconnu.
 
Dans le cadre de la réconciliation nationale, des loisirs sont proposés, parmi lesquels des concerts, des pièces de théâtre et autres manifestations culturelles, auxquels prennent part de nombreux enfants. Ces représentations culturelles sont l’occasion de sensibiliser la population et de mélanger les populations de religions différentes, a souligné la délégation.
 
La délégation a d’autre part expliqué que des juges devaient être spécialement formés aux droits de l’enfant.  Elle a souligné que l’École de la magistrature travaillait en collaboration avec des universités étrangères afin de proposer un programme spécial sur ces questions.  Les officiers de police judiciaire vont également recevoir une formation leur rappelant notamment l’interdiction la torture sur les enfants lors des procédures judiciaires et lors de la détention.
 
Des juridictions spéciales pour mineurs vont être installées dans différentes régions du pays, a par ailleurs indiqué la délégation.  Pour l’heure, a-t-elle reconnu, il n’y a pas de centres de détention spéciaux pour les mineurs et il s’agit là d’un grave problème. La volonté des autorités est de construire des centres de détention spécialisés pour les mineurs, a insisté la délégation.
 
La délégation a expliqué que l’objectif des autorités était de faire en sorte que la détention des mineurs soit une mesure de dernier recours et qu’elle reste une exception.
 
Des cellules sont adaptées pour que les mères en prison puissent allaiter leur nourrisson, a par la suite précisé la délégation.  Les enfants qui ont leur mère en prison sont pris en charge par une structure qui dépend du Ministère des affaires sociales, a-t-elle indiqué.
 
La délégation a souligné que le système éducatif s’était effondré durant les années de conflit. Néanmoins, depuis 2015, avec l’appui de l’UNICEF, près des trois quarts des écoles publiques ont pu rouvrir leurs portes.  À la rentrée 2016-2017, 98% des écoles étaient ouvertes aux élèves, a précisé la délégation.
 
La délégation a expliqué qu’en République centrafricaine, tout le monde dénonçait la qualité de l’enseignement; pour remédier à cette situation, les enseignants ont été davantage formés, avec des programmes mieux adaptés.  Plus de neuf cent écoles du pays bénéficient d’un programme de soutien de l’Union européenne. 
 
Les maîtres-parents sont des enseignants qui prennent en charge les enfants dans certaines régions du pays, a d’autre part expliqué la délégation.  Ils sont appuyés par les ONG et bénéficient de programmes de renforcement des capacités.  Les enseignants formés (soit environ 500 par an) sont actuellement redéployés sur l’ensemble du territoire centrafricain, a ajouté la délégation.
 
La délégation a assuré que l’école publique était gratuite pour tous les élèves.  Une petite contribution peut être demandée aux parents pour le sport, la réalisation des bulletins ou encore l’entretien des écoles, a-t-elle admis, tout en soulignant que cette contribution ne revient pas au directeur de l’école.
 
La délégation a ensuite expliqué que dans certaines écoles, peuvent être demandés des droits d’inscription afin de payer les salaires des maîtres-parents.
 
Si les parents ne peuvent pas payer certains frais scolaires, en aucun cas leurs enfants ne peuvent être refusés au sein de l’établissement, a ensuite assuré la délégation.
 
Les enfants déplacés à l’intérieur du pays ont été exemptés des frais d’examens; ils ont pu participer aux examens de fin d’année gratuitement, a ensuite fait valoir la délégation. Les enfants déplacés, qui suivaient des cours dans les lieux temporaires d’apprentissage, ont pu réintégrer leurs anciennes écoles gratuitement, a-t-elle ajouté. 
 
La délégation a reconnu qu’il manquait une base de données sur la situation des enfants handicapés.  Il n’existe pas d’institution spécialisée dans le pays qui puisse prendre en charge globalement les enfants handicapés.  Les enfants handicapés moteurs peuvent se rendre à l’école, a toutefois souligné la délégation. Certains enfants qui ont besoin d’une prise en charge spéciale sont appuyés par des ONG, a-t-elle également fait valoir.
 
Le Gouvernement réfléchit à une cartographie des familles d’accueil, afin d’avoir une vue globale sur la question, a d’autre part indiqué la délégation.
 
La société nationale des eaux multiplie les lieux de forage afin de permettre un plus grand accès à l’eau, a par ailleurs souligné la délégation.  Des programmes d’assainissement sont en cours en partenariat avec l’UNICEF, a-t-elle ajouté.  L’accès à l’eau est la priorité du Gouvernement, a insisté la délégation.
 
Le Gouvernement s’engage à harmoniser la législation nationale concernant le travail des enfants afin de la rendre conforme aux engagements internationaux du pays en la matière, a indiqué la délégation. Elle a expliqué que ce n’est que pour les enfants ayant abandonné l’école que l’âge légal minimum du travail avait été fixé à 14 ans, car ces enfants se trouvent dans une situation particulière.
 
La délégation a ensuite reconnu qu’il fallait accroître les contrôles pour lutter contre le travail des enfants dans les entreprises, notamment dans le secteur minier.
 
Les enfants de parents qui ne sont pas fonctionnaires ou salariés n’ont pas accès à la sécurité sociale, a reconnu la délégation; il s’agit là d’une grande préoccupation pour le Gouvernement, lequel réfléchit à la manière de pouvoir étendre la sécurité sociale à l’ensemble des enfants, a-t-elle affirmé.
 
La délégation a expliqué qu’elle prenait la question de l’adoption très au sérieux.  Les autorités centrafricaines étudient la possibilité de réactiver le Comité en charge de l’adoption, a-t-elle indiqué.  La délégation a dit apprendre ici l’existence de la Convention de La Haye mentionnée par un membre du Comité et s’est dite prête à étudier la question de son éventuelle adoption très rapidement.
 
Le Code pénal réprime tous les actes de torture et lorsque des agents de la police judiciaire sont soupçonnés d’actes de torture contre des enfants, des enquêtes sont immédiatement menées et les auteurs sont sanctionnés, a assuré la délégation.
 
La délégation a souligné qu’une campagne de vaccination avait été lancée dans les zones sécurisées du pays il y a peu, afin de permettre de protéger la santé des tout petits.
 
Les centres de vaccination ont été détruits durant le conflit et certaines ONG ont pris le relais pour assurer la vaccination, a poursuivi la délégation. Les centres de santé encore en fonctionnement ont été dotés de frigidaires leur permettant de stocker les vaccins et d’assurer les campagnes de vaccination.
 
Le taux de prévalence du VIH/sida a augmenté en raison du conflit, a d’autre part fait observer la délégation. Il faut apporter une réponse rapide pour stopper les contaminations et inciter les personnes à avoir des comportements sexuels responsables, a-t-elle souligné. Un programme spécial est prévu pour prendre en charge les femmes atteintes par le VIH/sida afin qu’elles ne transmettent pas le virus à leurs enfants.
 
Un programme de prévention et de lutte contre la mortalité maternelle prévoit la gratuité des consultations prénatales afin d’éviter les complications lors de la grossesse et de l’accouchement, a d’autre part indiqué la délégation.
 
La délégation a expliqué qu’en Centrafrique, les femmes allaitent davantage que dans d’autres pays car elles n’ont pas le moyen d’acheter du lait maternisé. L’immense majorité des femmes allaite, a-t-elle insisté.

Les attaques contre les centres de soins ont quasiment cessé, a d’autre part indiqué la délégation. Des ONG travaillent à la réhabilitation de certains hôpitaux endommagés par les combats, a-t-elle ajouté.
 
Avant le conflit, il existait une stratégie pour prendre en charge les enfants des rues, a expliqué la délégation. Ces enfants sont à la merci des groupes armés.  Aujourd’hui, un réseau d’ONG les prend en charge.

Une étude sur les enfants des rues a été menée dans trois villes, dont la capitale, Bangui.  Dans les trois localités étudiées, 6000 enfants au total se trouvent en situation de rue, a précisé la délégation.
 
La délégation a souligné que le Gouvernement effectue des contrôles périodiques pour tenter de confisquer les armes qui circulent dans le pays. Selon la délégation, il faut renforcer ces contrôles.
 
Remarques de conclusion 

M. CARDONA LLORENS, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de la République Centrafrique, a assuré que le Comité avait bien conscience des difficultés que rencontrent la République centrafricaine, notamment en ce qui concerne l’éducation et la santé. Les recommandations que formulera le Comité auront vocation à aider le pays à prendre des mesures pour le respect des droits de l’enfant et à obtenir l’aide internationale nécessaire, a-t-il indiqué.
 
M. BENYAM DAWIT MEZMUR, Président du Comité, a formulé le souhait que les enfants jouent un rôle central dans le redressement du pays et a encouragé la République centrafricaine à faire en sorte que les recommandations du Comité soient suivies d’effets.
 
MME VIRGINIE MBAIKOUA, Ministre des affaires sociales et de la réconciliation nationale de la République centrafricaine, a rappelé que les enfants et les femmes étaient toujours les premières victimes des conflits armés.  Les difficultés auxquelles fait face la République Centrafricaine sont avant tout sécuritaires, sanitaires et humanitaires, a-t-elle souligné.  Plusieurs priorités ont été définies par les autorités, parmi lesquelles la lutte contre l’impunité; l’accès à l’école; et la réintégration des enfants soldats, a-t-elle précisé.  Elle a réitéré le besoin d’aide internationale du pays et a remercié le système onusien pour l’ensemble de ses contributions au développement de la République centrafricaine.

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